La polémique sur la nocivité des antennes-relais embarrasse beaucoup les trois opérateurs mobiles français. Orange, SFR et Bouygues Telecom, qui participent jusqu’au 25 mai au Grenelle des antennes, craignent une atteinte durable à leur image. Mais ils se plaignent aussi d’une difficulté toujours plus grande à déployer leurs réseaux. « Il faut minimum deux ans pour installer une nouvelle antenne », déplore Eric De Branche, de l’Association française des opérateurs mobiles (AFOM).

La pose d’une nouvelle antenne (voire une simple remise à niveau) nécessite des autorisations administratives (permis de construire, autorisation d’émettre auprès de l’Agence nationale des fréquences…), des négociations souvent âpres avec les propriétaires du terrain ou les bailleurs de l’immeuble. La discussion coince en raison des inquiétudes des riverains, mais aussi pour des raisons patrimoniales, les propriétaires redoutant qu’une antenne ne fasse baisser la valeur de leur bien. Ce motif est la première cause des freins à la pose, selon les opérateurs.

La conséquence de ces ralentissements, c’est que les opérateurs n’auront vraisemblablement pas atteint les objectifs de couverture auxquels ils se sont engagés dans le cadre de leurs licences « 3G » (norme de téléphonie mobile de troisième génération). A ce jour, Bouygues Telecom, Orange et SFR assurent être parvenus à couvrir environ 75 % de la population, mais leurs obligations sont respectivement de 75 % (avant fin 2009), 98 % et 99,3 % (avant l’été 2009).

Du coup, de nombreuses zones « blanches » (non couvertes) ou « grises » (tous les opérateurs ne sont pas présents) persistent dans les zones rurales, y compris sur les réseaux de première génération (norme GSM). « Dans mon département, il manque une dizaine d’antennes sur la norme GSM, et à mon avis un bon millier en tout en France. Ne parlons pas de la 3G, où nous sommes complètement dans la panade », témoigne Bruno Sido, sénateur (UMP) de la Haute-Marne.

« LOGIQUE DE RENTABILITÉ »

« Il y a encore des zones blanches à seulement 10 km d’Agen. Sans parler de tous ces endroits où le téléphone ne passe pas quand on appelle des maisons ou en voiture », ajoute Jean Dionis du Séjour, député (Nouveau centre) du Lot-et-Garonne.

La lenteur de déploiement des réseaux pose aussi problème dans les zones urbaines, où, en raison de l’augmentation du trafic de l’Internet mobile mais aussi de la voix (une antenne ne supportant pas plus de 60 appels simultanés), les réseaux risquent de saturer.

La réticence des populations ne serait-elle pas cependant un argument commode des opérateurs pour limiter leurs investissements là où ils ont du mal à rentabiliser leur réseau ? Eux protestent de leur bonne foi, assurant pour Orange dépenser au moins 1 milliard d’euros par an dans son infrastructure mobile et 800 millions dans le cas de SFR. « Je ne crois pas qu’ils manipulent leur discours. Mais c’est vrai qu’ils sont dans une stricte logique de rentabilité : ils me disent par exemple qu’ils n’iront pas poser une antenne à 100 000 euros dans le village de Saint-Caprais-de-Lerme (Lot-et-Garonne) parce qu’il n’y a que 450 habitants », selon M. Dyonis du Séjour.

Existe-t-il des solutions pour pallier aux lenteurs des déploiements ? « Les opérateurs espèrent obtenir un élargissement du spectre radio sur lequel ils émettent. Ils étudient le délestage d’une partie du trafic mobile sur leurs réseaux fixes. Au pire, ils pourraient aussi laisser le service se dégrader lors des pics de communication. C’est moins grave pour les données que pour la voix : la communication n’est pas coupée, mais ça rame », explique Pierre Carbonne, de l’institut Idate. Mi-avril, l’Arcep a soumis à la concertation des opérateurs une proposition de mutualisation de leurs infrastructures au-delà de 95 % de la population couverte, pour accélérer la résorption des zones « blanches » sur la « 3G ».

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